Rivière
Là, sur son ventre en friche, au temps bref des paroles,
Tout le ciel à l’envers bouge parmi les lianes.
Ma main glisse en voyage et réveille un cristal.
Dès la source le temps a saisi l’estuaire.
Rivière à la rumeur éparse, aux jeux d’orfèvre
A quelle saison mûre épellerai-je enfin,
Fragile, chuchoté au plus proche des lèvres
Le seul jour de la pierre en le rêve arrêté ?
Parvenu à la mer j’apprends l’horizon seul.
Le brouillard se défait sur la lande des cils.
Un soleil vagabond s’enracine aux champs vierges
Et l’amande du monde engerme mon exil.
(30 octobre 1958)